📚 LES INTEMPORELS N°8 CADEAU DE DEUX CRITIQUES LITTERAIRES JEUNESSE RECONNUES !

EXTRAITS

« Un « désherbage » inquiétant dans les bibliothèques

« Premier intérêt de cette étude, le constat duquel elle part, qui est un peu inquiétant : hormis quelques titres du patrimoine très identifiés et surreprésentés en librairie ou dans les bibliothèques, des ouvrages que l’on pourrait pourtant qualifier de « classiques » peinent à être reconnus et mis en valeur aujourd’hui. Beaucoup de titres ne sont pas suffisamment considérés, alors qu’ils participent pleinement de l’Histoire de cette littérature et qu’ils présentent un intérêt majeur pour les jeunes lecteurs. Dans les bibliothèques qui ont un rayon jeunesse, en raison de l’afflux énorme de nouveaux titres, du besoin d’espaces sur les étagères, ou à cause d’une pratique qui consiste à juger de l’intérêt d’un titre uniquement à l’aune de son taux d’emprunt, plusieurs ouvrages sont aujourd’hui laissés dans les réserves. Dans le champ éditorial, c’est un peu la même chose : de nombreux livres qui font partie des « fonds » ne sont plus réédités, car ces livres se vendent en petites quantités et ne sont pas rentables, notamment à cause du coût lié à leur stockage. »

« Des œuvres majeures de l’Histoire de la littérature jeunesse pourtant méconnues

Pour comprendre cet état de fait, les autrices réfléchissent à la notion même de « classique » dans ce domaine. Comme elles le soulignent, « les bibliothèques n’ont certes pas l’obligation de tout conserver. Mais imaginerait-on que sur un territoire donné, aucun Flaubert, aucun Duras ni Le Clézio ne soit disponible à la lecture ? » Évidemment, non. Le fait qu’un livre soit identifié comme un « classique » est le fruit d’un lent processus qui combine plusieurs facteurs. Parmi eux, l’institution scolaire joue un rôle déterminant. Or, les livres pour la jeunesse, et tout particulièrement les albums pour les jeunes enfants, ne sont pas au centre des programmes de l’éducation nationale. Bien sûr, les élèves croisent des livres et des albums jeunesse dans leur parcours scolaire. Mais l’étude de ces livres, la compréhension de la manière dont ils s’inscrivent dans une longue Histoire, l’apprentissage de l’analyse spécifique que ces livres requièrent – toutes ces dimensions ne sont pour ainsi dire jamais enseignées en tant que telles. Par ailleurs, on peut parler dans le domaine de l’édition jeunesse d’une « édition sans mémoire » : et ce notamment parce que la critique, qu’elle soit médiatique ou universitaire, y est un champ fort réduit. »